Les jeunes entrepreneurs sociaux, pionniers d’une nouvelle économie

4 mai 2013 10 h 20 min2 commentaires

Etudiant en commerce à l’EDHEC et membre du projet Student Consulting for Development, Alexandre Anjuere n’a rien du naïf ni de l’extra-terrestre. Il est de ceux qui considèrent que l’économie solidaire n’est pas un oxymore, pas plus qu’un épiphénomène. Loin des lieux communs, il nous livre un plaidoyer sans ambages en faveur du social business, économie de demain, et de ceux qui le façonnent dès aujourd’hui, les jeunes.

L’action plutôt que les poncifs

« C’est la crise, rien ne va plus. La balance commerciale est déficitaire, le chômage n’en finit plus d’augmenter, l’économie se fiche de l’Homme. Alors que le navire coule, le capitaine, son équipage et les passagers constatent, impassiblement. Et la jeunesse dans tout ça, somnole semble-t-il, atone ou fainéante ». Voilà un discours que l’on inflige à nos oreilles chaque jour.

Pourtant aux antipodes de ces poncifs, des milliers de jeunes s’affairent à transformer concrètement le monde qui les a vu naître. Avec une pointe d’idéalisme et beaucoup de pragmatisme, ils tentent de faire émerger un monde où l’économie est réellement au service de l’homme et des générations futures. L’Economie Sociale et Solidaire (ESS) est un bon exemple de ce bouillonnement d’initiatives étudiantes. Tour d’horizon des jeunes acteurs de la planète ESS.

Des pères fondateurs globe-trotteurs

Student Consulting for Development

© Student Consulting for Development

Citons d’abord ceux qui souvent font office de pères spirituels de l’ESS dans le milieu étudiant : 80 hommes pour changer le monde. Deux étudiants d’HEC et de l’ESSCA se sont lancés en 2005 pendant 15 mois à la rencontre des entrepreneurs sociaux du monde entier. Ils ont témoigné de ce changement en marche dans un livre qui met à l’honneur 80 initiatives innovantes découvertes au cours de leur périple. Ce livre fondateur a permis à beaucoup d’étudiants de se rendre compte que les changements dont ils rêvaient étaient initiés, ils n’étaient plus seuls. Et se lancer devenait possible.

Bouillonnement de pragmatisme

Logiquement, les projets associatifs ont ensuite fleuri. Parmi eux, Vidéaux, une ONG étudiante née en 2007, qui produit des vidéos sur les entreprises innovantes du social business. Planète d’Entrepreneurs, fondée en 2009, aide quant à elle des entrepreneurs sociaux à mesurer leur performance  sociale. On pense aussi à Destination Changemakers, impulsée par deux étudiants de l’ESCP, qui contribue actuellement à la création d’alliances entre les entrepreneurs sociaux et les grands groupes. Spark Tour favorise pour sa part les échanges entre l’entrepreneuriat social et les médias.

Nous aussi, au sein de Student Consulting for Development, nous contribuons à promouvoir ces valeurs. Nous découvrons différentes structures de l’ESS et donc différents moyens de lutter contre l’extrême pauvreté : le micro-crédit dans une grosse ONG en Bolivie, la formation professionnelle dans une petite association du Togo et enfin l’entrepreneuriat social dans les énergies renouvelables en Thaïlande. A notre retour en France, nous poursuivrons le défi de la lutte contre la pauvreté en organisant des évènements et peut être aussi en publiant un guide du projet solidaire.

« Donc des jeunes utopistes s’activent… mais à quoi bon si chacun travaille dans son coin ? »

Multiples, les initiatives n’en sont pas pour autant isolées. De puissants réseaux lient aujourd’hui ces jeunes, leurs pensées et leurs actes. On citera Make Sense, qui met en contact les étudiants et les entrepreneurs sociaux, ou encore Enactus qui accompagne les étudiants à travers des rencontres, des formations et des concours nationaux et internationaux. A une autre échelle, on pense aussi à Ashoka, le plus vaste réseau d’entrepreneurs sociaux au monde.

« D’accord il y a des réseaux, mais si l’éducation ne change pas, les générations suivantes n’en feront rien. »

Sauf que l’éducation change… HEC a créé sa chaire Entreprise et pauvreté en 2008 ainsi qu’un Msc Sustainable Development (Développement durable), Audencia a fait de même et GEM (Grenoble) a même tissé un partenariat avec Bioforce (école de référence dans le domaine de l’humanitaire) pour créer un nouveau Master.

« Très bien mais les grosses entreprises qui dominent le monde se moquent pas mal de cette agitation. »

Ashoka logo

Ashoka regroupe plus de 3.000 entrepreneurs sociaux à travers le monde

Et bien non ! Certaines sont très actives dans le domaine. Que dire de Danone qui met au centre de son business model la création d’aliments plus sains pour améliorer la santé des individus et de la création de Danone Communities qui tisse des partenariats avec des entreprises sociales en France et à l’international ? Que penser de Lafuma qui conçoit tous ses produits  de manière à ce qu’ils ne laissent pas de traces sur notre environnement et sur les petites mains qui les assemblent ? On est ici au-delà d’une simple stratégie de communication. Ces entreprises ont compris quels étaient les enjeux de demain et jouissent étonnamment d’une bonne santé financière.

Toutes ces initiatives permettent à l’évidence à notre monde de s’améliorer, certes encore modestement. On peut toujours s’interroger sur la sincérité et l’efficacité à long terme de cette myriade de projets, mais ils ont au moins le mérite d’ouvrir l’esprit de la jeunesse. De lui offrir une nouvelle grille de lecture de l’économie, une nouvelle façon de la développer.

Parmi tous ces étudiants et jeunes diplômés, certains dirigeront le monde de demain. Leur connaissance des problématiques de développement et des outils de l’économie solidaire leur permettront d’éviter les erreurs commises par leurs aïeux. Plus que tout, cette jeunesse aura compris que l’assistanat n’est pas la solution et que l’entreprise sociale, couplée à de véritables politiques RSE au sein des grands groupes, contribuera à enraciner et faire grandir une économie plus juste et plus humaine.

Alexandre Anjuere

Student Consulting for Development 2013 est une association de 5 étudiants de l’EDHEC qui mettent à profit leur année de césure pour venir en soutien à des initiatives locales à l’étranger en collaboration avec des acteurs de l’économie sociale et solidaire (entreprise sociale, association, ONG…).

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2 commentaires

  • Bon article, merci pour les liens !
    Merci M. Anjuere, bonne continuation 🙂

  • olivier girault

    Bravo Alexandre pour cet article fort intéressant et très bien rédigé. J’aimerai que tu puisses aussi un jour découvrir l’ONG philippine « Gawad Kalinga » et sa branche Social Business (GK-CSI). Un petit joyaux ! Bonne continuation.

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